Chers amis,
Quelques moments forts ces dix derniers jours, pour les médecins libéraux que nous sommes.
Tout d’abord, un moment véritablement historique le 11 février : les Assises Libérales, qui ont vu se réunir les cinq syndicats médicaux libéraux, afin d’écrire une Convention commune à présenter à l’Assurance Maladie. Du jamais vu ! Les médecins ont planché toute la journée, sur des thèmes préalablement définis en commun, dans une belle organisation orchestrée par la CSMF (nous remercions tout particulièrement Stéphane Landais). Dans chaque atelier, l’ambiance a été non seulement studieuse, mais aussi constructive, conviviale, et même chaleureuse. Dans certains, les participants se sont même applaudis à la fin, heureux qu’ils étaient de s’être aussi bien entendus sur les points essentiels. Un grand moment d’émotion, tout particulièrement pour la FMF, qui a initié ce mouvement, comme l’a rappelé à la tribune Claude Leicher, le Président de MG-France. Retrouvez le dossier-presse qui résume les riches positions qui en sont issues, que nous allons défendre lors des négociations conventionnelles. Ca tombe bien, nous y retrouvons les notions de forfait-structure, de secteur unique à honoraires modulables, de défense des confrères, et autres idées portées par la FMF depuis des années.
Vous le savez, le même jour se tenait la \ »Grande Concertation sur la Santé\ » voulue par le 1er Ministre Manuel Valls. Concertation sans les médecins libéraux donc. \ »Cela n’est pas très grave\ », avait estimé notre chère MariSol Touraine, il y aura beaucoup d’autres personnes. Dont acte. La Santé, sans les médecins de proximité. Je vous laisse comparer la productivité d’une journée de travail par des libéraux (ci-dessus), et par des institutionnels dont les seuls documents officiels sont les discours d’ouverture de MariSol Touraine et de clôture de Manuel Valls. Ce dernier a essentiellement porté sur la Formation Médicale Initiale, et sur une annonce : amélioration de la couverture maternité pour les femmes médecins libérales, en secteur 1 seulement. C’est bien connu, celles qui exercent en secteur 2 ne font rien, et peuvent vivre des grossesses épanouies (voir communiqué de la FMF). Je n’ai rien trouvé à rapporter dans celui de Mme Touraine. Elle n’avait pas dû lire Le Monde, dans lequel notre président Jean-Paul Hamon avait exposé quelques mesures pour sauver la médecine libérale, sans coûter autre chose que du courage à nos politiques.
En revanche, beaucoup de choses à dire à l’issue de la présentation du rapport sur le tiers-payant généralisé, le 17 février. Concernant l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO), le calendrier sera le suivant : 1er juillet 2016 : les médecins pourront proposer le tiers-payant aux patients ALD et en maternité (rien de bien nouveau donc) ; cela deviendra obligatoire le 1er janvier 2017 ; et le 1er décembre 2017, ils pourront étendre le tiers-payant à tous leurs patients. Vous apprécierez la sémantique : \ »pourront\ » … On y a appris que le médecin sera payé, du moment que les droits sont ouverts au moment de la consultation (ce qui semble une évidence, mais apparemment, ce n’est pas le cas aujourd’hui !), même si le patient est \ »hors parcours de soin\ ». Et que l’Assurance Maladie s’engage à \ »réduire le nombre de rejets\ ». Ce qui signifie tout de même qu’elle admet que nous aurons des actes non payés. Mais le plus important est venu des assurances complémentaires (AMC), exclues du dispositif obligatoire par la censure du Conseil Constitutionnel. Elles encouragent les médecins à pratiquer également le tiers-payant avec elles, en leur faisant signer des contrats individuels, et en utilisant un canal spécifique d’émission de factures. Comme il sera très compliqué de faire les rapprochements bancaires puisque les remboursements AMO et AMC n’interviendront pas au même moment, elles suggèrent de contracter avec des plate-formes spécifiques. A nos frais évidemment. Payer pour espérer être honorés de nos actes ! Pour obtenir l’adhésion d’un maximum de médecins, le Directeur de la Mutualité, M. Emmanuel Roux, compte sur « le pouvoir de conviction » de l’Assurance Maladie, comme vous pouvez le voir sur cette nouvelle vidéo de Xavier Gouyou-Beauchamp. Réactions dans les médias : Les Echos explique benoîtement qu’il aurait été trop compliqué pour la Sécu de gérer elle-même le paiement de la totalité des actes ; il est donc normal que ce soit les médecins qui le fassent. Remarquez au passage que le journaliste parle de « financeurs » en nommant les AMO et AMC. Non, Monsieur le journaliste, les financeurs, ce ne sont pas les assureurs, ce sont les cotisants. Les assureurs ne sont que des gestionnaires. Enfin, retrouvez le franc-parler de Jean-Paul Hamon, invité à s’exprimer sur ce rapport, sur LCI.
Et pour finir, je vous invite à lire le dernier rapport de l’IRDES. Rien que le titre laisse rêveur : « Analyse de sensibilité de l’accessibilité potentielle localisée ». ??! En fait, ça veut dire : « est-ce que tous les français peuvent voir un généraliste pas trop loin de chez eux ? ». Pour vous mettre en bouche, je vous cite un passage :
A l’opposé, parmi les 92 communes dont l’APL passe du dernier quintile avec l’APL initiale au premier quintile avec la fonction exponentielle, la commune B (tableaux 17, 20 et 21) passe de 83 à 43 ETP/100 000 habitants. Pour cette commune, l’APL initiale est définie par l’accessibilité à une seule offre, celle disponible sur son territoire (tableau 20) en raison de l’absence de communes disposant d’une offre en deçà de 15 minutes. Ou encore : La comparaison de l’indicateur initial avec le scénario utilisant une fonction continue bornée pour les ETP et la fonction de décroissance gaussienne (moins restrictive que la précédente en termes d’accessibilité à l’offre) met logiquement en évidence une « convergence » entre les indicateurs un peu moins importante puisque pour 42 % des communes (contre 47 % dans le cas précédent), le calcul de l’APL avec une fonction continue bornée pour les ETP et une fonction de décroissance gaussienne ne conduit pas à une modification de leur rang
. Ne riez pas, c’est avec vos impôts que ces rédacteurs sont rémunérés. Et après, on viendra nous dire que l’Etat n’a plus de sous pour payer des soins de qualité aux patients …Je vous souhaite une très bonne semaine.