Jeudi 11 février 2021 a eu lieu une séance du GT ROSP (Groupe de Travail sur la Rémunération sur Objetifs de Santé Publique). Une séance à la fois mémorable et hallucinante.
Globalement, la CNAM finit par admettre du bout des lèvres que la COVID a eu une influence négative sur un grand nombre des items de la ROSP, et confirme donc (après l’avoir totalement niée lors d’une première réunion à l’automne 2020 !) notre analyse sur ce sujet. Son analyse est plus complète, parce qu’elle a la primeur des données du 4ème trimestre 2020. Mais toutes les baisses que nous avions pointées sont confirmées, alors qu’elles portent toutes sur des items en hausse ces dernières années (ceux qui veulent voir l’analyse complète de la CNAM peuvent la télécharger en fin d’article) :
- une forte augmentation des prescriptions d’anxiolytiques
- une forte augmentation des prescriptions d’hypnotiques
- un net déficit de la vaccination, en particulier infantile
- des conséquences sur
- les bilans de surveillance des diabétiques
- nombre d’HbA1c
- surveillance de la fonction rénale
- surveillance du fond d’œil
- la surveillance rénale des hypertendus
- la surveillance des traitements anticoagulants
- les EFR des asthmatiques
- les bilans bucco-dentaires
- et les dépistages dans cancers.
- les bilans de surveillance des diabétiques
Certains items sont malgré tout en amélioration : c’est le cas de la vaccination antigrippale, qui n’atteint pourtant que de justesse l’objectif de 61% de vaccinés parmi les plus de 65 ans, et n’arrive pas à l’objectif de 42 % pour les moins de 65 ans à risque. Ce qui laisse quand même plusieurs millions de patients non vaccinés, alors que la totalité des vaccins grippaux a été utilisée, et confirme ce que nous disons depuis plusieurs années : il n’y a pas assez de vaccins grippaux pour atteindre les objectifs fixés (arbitrairement) par la CNAM.
L’autre item en amélioration nette est l’utilisation des antibiotiques. Ce qui est logique puisque les mesures de distanciation sociale ont fait chuter les pathologies infectieuses.
Pour les items « économiques » relatifs aux prescriptions, c’est plus contrasté, certains en hausse, certains en baisse. Sans explication nette.
Tout ceci montre à l’évidence que l’atteinte des objectifs ne dépend en grande partie pas des médecins, et que tout ce dispositif n’est qu’une mascarade.
Surtout quand on voit la réponse de la CNAM : l’analyse item par item de l’impact pour les médecins est trop compliquée (pour l’informatique de la CNAM), les projections des montants probables montrent une progression probable de l’ordre de 1% du montant total, donc les choses s’équilibrent, et il n’y a pas lieu de tenir compte de l’impact COVID dans la ROSP 2020 !!!
On croit rêver !
Non pas pour l’incapacité de la CNAM à analyser finement, tous ceux qui ont suivi nos conseils et contesté les résultats de leurs ROSP passées ont pu constater que ces contestations sont immanquablement suivies de corrections en faveur des médecins, preuve que la CNAM ne sait pas compter !
Mais l’aspect Santé Publique de cette ROSP est totalement ignoré par la CNAM. Ce n’est en réalité qu’une RO (Rémunération sur Objectifs), et même plutôt une ROE (Rémunération sur Objectifs Économiques).
D’autant plus que la stabilité n’existe en réalité que parce que les patientèles moyennes augmentent (ce qui est logique puisque le nombre de médecins baisse).
Pour les ROSP spécialistes plutôt orientées à la baisse, la CNAM propose bien une correction, mais là aussi purement comptable : prise en compte de 2 mois supplémentaires (nov et déc 2019) dans le calcul de la patientèle correspondante pour compenser la baisse d’activité ! où est l’aspect médical dans cette réponse ?
Si la CNAM veut favoriser les paiements forfaitaires, qu’elle le dise donc clairement, et ne se cache pas derrière le fallacieux prétexte de la Santé Publique, dont on sait depuis longtemps qu’elle n’est pas améliorée par la ROSP, laquelle est d’ailleurs massivement rejetée par la profession. La FMF réclame depuis des années le report des sommes allouées à la ROSP vers un véritable Forfait Structure pour TOUS les médecins libéraux, qui permette d’investir et d’embaucher
Le Collège de la Médecine Générale a mis en place un Groupe de Travail interne pour faire des propositions d’amélioration de la ROSP, portant essentiellement sur justement ces aspects médicaux et de santé publique. Nous attendons avec impatience ces propositions.
Ah quand même une (petite) avancée : la CNAM reconnaît aussi que l’item Dépistage du Cancer du Col est totalement déphasé par rapport aux recommandations de l’HAS et convient qu’il faut le faire évoluer. Mais un vote en CPN sera nécessaire, même si en l’occurrence ce sera de pure forme, tous les syndicats étant d’accord sur ce point.