Chaque année la CNAM réalise au niveau national un ciblage statistique des médecins, pour leurs prescriptions d’IJ entre le 15 septembre et le 15 janvier de l’année suivante. Avant l’été, ces nomminés du « délit statistique » sont alors informés par les CPAM en régions de leur « déviance » par rapport à la « norme » et du démarrage d’une procédure selon l’art L162-1-15 du code de la sécurité sociale ! Une mesure de Mise Sous Objectif (MSO) leur est alors proposée et seuls les récalcitrants qui refusent de s’auto-punir avec la MSO, sont convoqués devant les commissions départementales des pénalités pour Mise Sous Accord Préalable (MSAP).
En 2014, la Cellule Juridique de la FMF constatant la croissance exponentielle de confrères ciblés par les directeurs de CPAM qui ne respectaient pas les termes de la loi (notamment « l’activité comparable ») a sollicité en octobre son Conseil d’Administration (CA) pour ester en justice. La FMF s’est associée à 6 médecins dépendants de 6 CPAM (Eure, Eure-et-Loire, Hérault, Ile-et-Vilaine, Oise et Vaucluse) pour saisir les Tribunaux Administratifs :
D’une requête en référé « Mesures utiles » selon l’article L521-3 du code de la justice administrative
D’une requête au fond en « Excès de pouvoir » en ce qui concerne l’application de l’art L162-1-15 par les directeurs de CPAM.
Les 6 référés ont été rejetés par les juges administratifs qui n’ont retenu ni la notion d’urgence (justifiant un référé) ni celle de sanction (en ce qui concerne la MSAP) ! Pourtant les faits montent bien qu’en ce qui concerne le jugement sur le fond (dans le dossier traité le plus rapidement : TA de Nimes) l’audience ne s’est tenue qu’en 2016, postérieurement à ce qui est bien une sanction, la MSAP (effectuée en 2015).
Pour la CJ de la FMF, la MSAP est bien une sanction le médecin étant stigamtisé devant sa patientèle, contraint de justifier tous les arrêts de travail au cours de la période et être sous le coup d’une pénalité financière à la 2è récidive.
Mais par une décision du 4 mars 2016 (audience du 04/02/2016), le Tribunal Administratif de Nîmes vient de donner raison aux arguments de la FMF représentée par Maître Thibault VIDAL en annulant la MSAP décidée par le directeur de la CPAM du Vaucluse à l’encontre d’un confrère,
Condamnant la CPAM du Vaucluse à verser la somme de 1 200 € à ce confrère au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative.
Le TA de Marseille, dans une audience du 18 octobre 2011 avait déjà condamné la caisse des Bouches-du-Rhône pour l’application abusive de l’art L162-1-15 à propos de transports sanitaires, mais c’est à ma connaissance la première fois qu’une CPAM se voit condamnée pour la MSAP d’un médecin généraiste à propos de ses prescriptions d’IJ.
Epilogue : J’ignore encore en écrivant ces lignes si ce confrère va décider de réclamer des dommages (justifiés étant donné qu’il a effectué une MSAP que le juge administratif vient de récuser), mais depuis le démarrage de cette affaire en 2014, écoeuré par ces attaques incessantes de leur CPAM, ce médecin ainsi que sont épouse ont « déplaqué » et sont partis exercer la médecine salariée en septembre 2015.
En lui rendant hommage pour cette victoire qui est aussi la sienne, qu’il me permette de le citer en guise de conclusion :
« … Notre petite ville de 15 000 habitants deviendra bientôt un nouveau désert médical avec 2 « conversions », un déménagement et 2 ou 3 départs à la retraite, passant de 10 à 4 médecins ! … »
Alors si demain vous êtes concerné par une procédure de ce type vous savez que vous devez refuser la MSO et pouvez contester devant le TA une éventuelle MSAP. La FMF et sa CELLULE JURIDIQUE seront toujours là pour vous conseiller et vous assister.
Dr Marcel GARRIGOU-GRANDCHAMP
Cellule juridique FMF