Vous êtes en principe habitués à faire attention à ce que vous écrivez dans un certificat et au niveau des « éléments d’ordre médical justifiant l’arrêt de travail » du formulaire CERFA n° 10170*04 – S3116f d’arrêt de travail en maladie (Art L162-4-1 1er alinéa du code de la sécurité sociale) visibles sur le seul volet n°1 mais que le patient peut photocopier et exploiter (à l’insu du prescripteur) dans une procédure Prud’hommale (d’où l’intérêt à utiliser AMELI PRO étant donné que dans ce cas le patient ne dispose pas de ce volet).
J’en profite pour vous rappeler que le médecin ne peut certifier que ce qu’il a personnellement constaté et que courrier ou certificat concernant un patient doit lui être remis en mains propres et en aucun cas à un tiers.
Mais faites-vous attention à ce que vous écrivez à un confrère dans un courrier que vous lui adressez ? Si ce n’est pas le cas je ne saurais trop vous conseiller d’y veiller à l’avenir ce qui vous évitera de vous trouver confronté à la plainte ordinale d’un employeur. Je vous sens dubitatif, alors lisez bien les lignes ci-dessous !
Depuis la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé et son Art. L. 1111-7 le patient peut avoir accès à l’ensemble des documents le concernant détenus par les médecins lui ayant donné des soins.
Depuis les ordonnances de 2017 pour la loi travail, en cas de licenciement les indemnités Prud’hommales sont plafonnées sauf à prouver que le licenciement est injustifié notamment en cas de situation de harcèlement professionnel.
En cas de conflit avec son employeur le salarié va donc réclamer son dossier médical auprès de son médecin et l’éplucher avec son défenseur afin de rechercher les éléments lui permettant d’étayer cette thèse.
Ainsi dans un tel dossier, un salarié licencié pour inaptitude a fait valoir devant les Prud’hommes le courrier adressé par le cardiologue à son médecin traitant où il écrivait : « … le stress professionnel semble favoriser les poussées d’hypertension artérielle…La TA systolique est proche de 150-160 mmHg lorsqu’il travaille… » Bien évidemment le cardiologue ne pouvait avoir constaté personnellement ni le stress au travail ni son impact sur la tension artérielle.
Afin de se défendre devant la juridiction, l’employeur et son défenseur entendaient poursuivre ce médecin devant l’Ordre pour violation :
- De l’art R4127-28 du code de la santé publique : « …la délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite… »
- De l’art R4127-76 du même code : « …l’exercice de la médecine comporte normalement l’établissement par le médecin, conformément aux constatations médicales qu’il est en mesure de faire, des certificats, des attestations est documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires… »
Et il citait à l’appui de sa démonstration la jurisprudence de la Chambre disciplinaire du CNOM qui rappelle qu’est soumise au mêmes règles de prudence et d’objectivité la rédaction d’un « courrier par un médecin à un confrère, faisant état de ses observations au sujet d’un patient » en rappelant que cette pièce « fait partie du dossier médical » et, en conséquence, « que, même s’il ne revêt pas la forme d’un rapport, d’une attestation ou d’un certificat, il doit être rédigé avec la même prudence et ne peut faire état que de constatations médicales » (CDPI CNOM du 23/02/2016, n° 12841, Dr Frédéric B.)
Chaque fois que vous écrirez à un confrère, chaque fois que vous noterez des remarques dans votre dossier médical, souvenez-vous bien de ces remarques.
Confraternellement
Dr Marcel GARRIGOU-GRANDCHAMP, Lyon 3è, CELLULE JURIDIQUE FMF
Tél : 06 09 30 78 61 Fax : 09 56 76 12 53
mel : dr.marcel.garrigougrandchamp@lerss.fr