De façon subreptice, on a vu la sécurisation des factures en général et des tiers payants en particulier se dégrader pour les médecins entre la convention de 2016 et celle de 2024.
En effet, nous avions une rédaction très favorable de l’article 59 de la convention 2016, qui en particulier listait les protections pour les médecins :
Les engagements de l’assurance maladie en matière de paiement et de suivi de facturation sont les suivants :
- La garantie de paiement sur la base des informations inscrites dans la carte Vitale du patient et ce, même si ce dernier n’a pas mis sa carte à jour.
- Les rejets liés aux droits des patients sont supprimés ; pour toute FSE réalisée avec une carte Vitale, les rejets liés aux droits des patients sont supprimés, quels que soient les changements de situation du patient : changement de régime ou de situation familiale, déménagement, etc.
- En l’absence de carte Vitale, le service ADRi permet d’obtenir une situation de droit à jour pour le patient lors de l’établissement de la FSE, en accédant aux droits du patient figurant dans les bases de l’Assurance Maladie. Grâce à la protection universelle maladie pour l’ensemble des travailleurs et résidents en France, les patients bénéficient de droits continus à l’assurance maladie obligatoire.
- Les rejets des factures liés au parcours de soins sont supprimés.
Avec en particulier un engagement très fort sur le fait que le service ADRi permettait d’avoir l’assurance d’être payé si on l’utilisait en l’absence de Carte Vitale (donc en facturation dégradée).
Ces dispositions ne se retrouvent pas du tout dans le texte de la convention 2024, on peut juste y lire à l’article 116 :
La garantie de paiement (article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale) se fait sur la base de l’utilisation de la carte Vitale du patient (carte physique ou sous forme d’application mobile). L’utilisation du seul service ADRi sans lecture de carte Vitale sous forme physique ou application mobile ne donne pas droit à la garantie de paiement.
avec cette précision qui ne rassure pas du tout :
L’Assurance maladie s’engage à renforcer l’accompagnement des médecins rencontrant des rejets de facturation. À cette fin, les médecins concernés recevront systématiquement un mail d’information et pourront bénéficier le cas échéant d’un contact sortant, réalisé par un agent de la caisse de rattachement du patient
Parce qu’en fait je ne veux pas être informé sur les rejets, je veux être payé sans rejet.
A quoi sert donc l’outil ADRi s’il ne fait que sécuriser la carte Vitale, laquelle devrait déjà se suffire à elle-même ? Serait-ce à dire que la CNAM croit si peu à son informatique qu’elle ne lui fait pas confiance pour sécuriser la facturation ?
Parce que la convention ou la loi nous obligent à pratiquer le tiers payant dans un nombre croissant de situations :
- soins en rapport avec un accident de travail ou une maladie professionnelle ;
- consultations au cours desquelles vous prescrivez un contraceptif ou des examens de biologie médicale à une mineure d’au moins 15 ans ;
- actes de prévention réalisés dans le cadre d’un dépistage organisé (par exemple, la mammographie effectuée lors du dépistage organisé du cancer du sein) ;
- examens de prévention bucco-dentaire dispensés aux enfants ou adolescents âgés de 6, 9, 12, 15 et 18 ans, ainsi que les soins consécutifs à cet examen, pour les enfants de 6 et 12 ans ;
- actes de lecture différée d’une rétinographie en couleur, sans la présence du patient, par le médecin lecteur dans le cadre du dépistage de la rétinopathie diabétique ;
- honoraires perçus pendant une hospitalisation dans un établissement sous convention avec l’Assurance Maladie, pour la part obligatoire et, le cas échéant, pour la part complémentaire ;
- soins dispensés à un patient bénéficiaire de la Complémentaire santé solidaire ;
- soins dispensés à un patient en affection de longue durée (ALD) ou à un patient pris en charge au titre de l’assurance maternité ;
- soins dispensés à un patient bénéficiaire de l’aide médicale d’État (AME) ;
- soins dispensés dans le cadre de la permanence des soins (intervention suite à régulation ou du centre d’appel de l’association de permanence des soins), pour la part obligatoire ;
- examens et soins dispensés à une patiente enceinte exposée au virus Zika ;
- soins en lien avec un acte de terrorisme.
auxquelles il faut rajouter
- actes en rapport avec la contraception des moins de 26 ans ;
- IVG ;
- Soins en lien avec l’article 115 ;
- consultations obligatoires des enfants ;
- rendez-vous de prévention aux âges-clés de la vie.
alors même qu’il ne nous est pas permis d’espérer la sécurisation de ces tiers payants par les outils que la CNAM met à notre disposition.
Voilà qui est pour le moins fort curieux, et fort dérangeant.