Chers amis,
Peu de nouvelles sur le front du Projet de Loi du Financement de la Sécurité Sociale, (PLFSS) dont je vous ai parlé la dernière fois et dont la discussion vient de se terminer à l’Assemblée Nationale, sans avoir eu le temps de tout examiner. Il va maintenant partir au Sénat. On note que les articles 15 (décision unilatérale de la Caisse pour baisser les tarifs de façon autoritaire) et 16 (nécessité de s’assurer avant de prescrire que l’acte est bien pris en charge pour cette indication et qu’il suit les recommandations de la HAS) n’ont pas été supprimés. Et qu’est apparu un amendement pour dispenser de cotisation retraite les médecins retraités-actifs, mais sans dire par qui sera compensée cette baisse de revenus pour la CARMF. Au passage on apprend que plusieurs députés ont demandé l’abrogation d’une taxe sur les sucres transformés. Ah, si nous avions le temps et les moyens de faire du lobbying comme l’industrie agro-alimentaire !
Ce qui prête à confusion cependant, c’est la parution le 31 octobre du décret sur les Indications Thérapeutiques Reconnues (ITR), alors que c’est un point contenu dans le PLFSS actuel en cours de discussion (le ci-dessus Art.16). En réalité, comme nous l’explique l’incontournable Richard Talbot, la LFSS de l’an dernier et celle de 2018 avaient déjà posé le sujet, et ce décret en précise l’application. Que nous dit-il, ce beau décret ? Que pour certaines prescriptions, il nous faudra remplir un formulaire spécifique indiquant le motif de ladite prescription. Formulaire d’accès facile sur AmeliPro, nous affirme le Directeur de la CNAM Thomas Fatôme. Sauf que pour nous « accès facile » et « AmeliPro » sont souvent 2 termes antinomiques. Et comment faire sans connexion Internet (visites à domicile), ou sans CPS (remplaçants non thésés, internes en formation) ? Alors bien sûr, il ne faut pas s’affoler nous dit-on, ce dispositif ne concernera que quelques prescriptions, rares, ne nous prendra pas de temps, … violons et compagnie. Mais le décret ne mentionne aucune limite, et le jour où la Caisse décidera de le faire appliquer pour les prescriptions d’antalgiques niveau 2 par exemple qui sont dans le collimateur (il y a 10 ans on n’en prescrivait pas assez soi-disant, aujourd’hui c’est trop …), voire pour le Paracétamol dont le volume de prescriptions affole la CNAM, rien ne l’en empêchera.
Aujourd’hui, ce sont les analogues de la GPL1, ou « glutides » qui sont visés. Eh oui, ces antidiabétiques ont également une AMM dans le traitement de l’obésité, mais ils ne sont pas remboursables dans cette dernière indication. La Caisse a très peur que des médecins « mal-intentionnés », ou peut-être « bien-intentionnés » en vue d’éviter des complications ultérieures, prescrivent ces traitements en omettant de préciser « Non Remboursable ». Sans oublier que même dans le diabète, ils ne sont remboursables qu’en complément de la Metformine, sans exception aucune.
Et pour ajouter encore à la complexité, ces glutides (Liraglutide, Sémaglutide) peuvent être prescrits initialement par tout médecin dans l’indication du diabète, mais sont réservés aux endocrinologues/nutritionnistes dans l’indication obésité.
Vous n’avez rien compris ? Je vous rassure moi non plus. J’ai juste compris qu’avant de formuler une ordonnance il faudra bientôt s’assurer :
- que le médicament a bien une AMM pour cette pathologie ;
- que nous avons le droit de le prescrire ;
- qu’il est bien remboursé dans cette indication ;
- que nous avons respecté les mentions spéciales ;
- qu’il figure dans la liste recommandée par la HAS pour cette pathologie.
Pas sûr que la 10ème année d’études supplémentaire pour les médecins généralistes suffise. Je propose d’imposer le cursus ENA avant d’obtenir le diplôme de médecin. Heureusement les Infirmiers de Pratique Avancée sauront faire beaucoup mieux que nous …
Une bonne nouvelle dans ce triste paysage : les demandes d’indus formulées par la CPAM 22 à l’encontre d’un psychiatre et d’une généraliste, qui avaient eu le malheur de prescrire en téléconsultation des arrêts de travail > 3 jours pour des patients dont ils n’étaient pas le médecin traitant (MT), ont été annulées. Mais pas l’article en cause. Il faut donc continuer d’envoyer au médecin traitant toute demande d’arrêt de travail émise en téléconsultation.
J’en profite pour vous informer des nouvelles modalités de la Convention 2024 concernant les téléconsultations. Désormais la limite de 20% du volume d’actes annuels ne s’applique qu’aux patients dont nous ne sommes pas le médecin traitant. Et elle est portée à 40% pour les psychiatres. Si vous avez des situations particulières nécessitant une augmentation de ces seuils, il faut demander une dérogation en Commission Paritaire Locale (CPL). En revanche persiste la notion du respect du parcours de soins, excepté pour les patients en Zone d’Intervention Prioritaire (ZIP), les patients sans médecin traitant, en cas d’urgence ou dans le cadre du Service d’Accès aux Soins (SAS). Je résume :
- pas de limite pour les médecins traitants
- 40% des actes maxi pour les psychiatres
- 20% des actes maxi pour les autres médecins
A condition que le patient soit également vu en consultation présentielle par le médecin, sans autre précision.
Actuellement les actes techniques (en CCAM) sont exclus des téléconsultations, mais la FMF œuvre pour qu’ils soient admis également, notamment dans le cadre de téléconsultations assistées par une infirmière auprès de patients difficiles à mobiliser (exemple Holter, EFR, échographies ciblées, …). A suivre …
Je vous souhaite une bonne semaine.