Chers amis,
Nous voici déjà en octobre, et les premières feuilles d’automne signent la fin de quelques dérogations.
D’abord la prise en charge en 100% AMO (Assurance-Maladie-Obligatoire) des téléconsultations n’est plus assurée. Il nous faut désormais (nous, et les plates-formes commerciales) demander aux patients le paiement d’au moins le ticket modérateur. Cela ne devrait pas poser trop de soucis avec nos patients bien connus. Mais comment faire lors des téléconsultations avec de nouveaux patients, notamment dans le cadre des Soins Non Programmés (SNP) ? Aurons-nous la culture de faire payer avant de donner accès à la consultation ? Avons-nous tous des moyens de paiement en ligne ? A noter qu’en revanche, l’exemption d’envoi des feuilles de soins papier pour la facturation en mode dégradé (c’est-à-dire télétransmission sans Carte Vitale du patient) s’applique toujours pour les téléconsultations.
Puisque nous parlons de Soins Non Programmés, il faut dire également adieu depuis le 1er octobre aux mesures de la fameuse « Mission Flash » de juillet. Exit la régulation libérale en journée rémunérée 100 euros par heure (120 dans les DOM) et exercée sous le statut de Collaborateur Occasionnel de Santé Publique, plus sécurisant sur le plan assurantiel. Exit aussi la majoration de 15 euros pour les patients reçus via le 15. Certes, les médecins ont très peu utilisé cette majoration, car assurant la quasi totalité des soins non programmés sans passage par la régulation 15, comme le montre l’enquête rétrospective de la FMF. Mais on aurait pu penser que ces mesures de l’été constitueraient une expérimentation, à améliorer, avant extension à l’ensemble de l’année. En acceptant par exemple toute forme de régulation officielle, non limitée au 15. Que nenni, nous nous retrouvons régulateurs sous-payés, mal assurés, et effecteurs à la solde d’une régulation gérée par l’hôpital à qui nous devons confier la gestion d’une partie de nos agendas (c’est le système Service d’Accès Aux Soins=SAS), sans réelle contrepartie financière hormis quelques points sur le forfait structure qui sera versé au milieu de l’année suivante. La FMF demande la prolongation de ces dérogations qui doivent devenir la règle, et qui avaient l’avantage d’un travail commun avec le SAMU dans un respect mutuel.
Arrivent en revanche des « consultations de prévention » à 25, 45, 65 ans, dont on ne sait pas grand-chose, sauf qu’elles seront gratuites, et annoncées à grands renforts de publicité par notre Ministre de la Santé François Braun. Le cadre exact en sera défini lors de la parution de la Loi de Finance de la Sécurité Sociale (LFSS) discutée comme chaque année en novembre : qui va les assurer, quels contenus, quelles rémunérations ? Nous devrions en savoir plus en fin d’année.
Je vais entrer maintenant dans du lourd : l’accès aux soins, notamment à un médecin traitant, pour tous. Nous avons eu droit ces derniers temps à un florilèges de propositions de la part de nos politiques, je ne sais pas à qui donner la palme.
Est-ce à ceux qui poussent à la délégation de diagnostics médicaux à nos amis pharmaciens et infirmiers selon des protocoles établis avec soin ? Voilà ce que ça donne en image pour la varicelle par exemple. Digne d’un shaddok ou d’un coyotte (dans Bip-bip et le Coyotte). Est-ce ce ne serait pas plus simple de consulter un médecin qui fera le diagnostic en 3 secondes, seulement en soulevant le tee-shirt du bambin ? Et qui poussera même jusqu’à diagnostiquer ladite varicelle avant 12 mois et après 12 ans. Je ne crois pas avoir jamais entendu un médecin se plaindre de devoir assurer ce type de consultations. En revanche, nous donner les moyens de déléguer nos tâches administratives à du secrétariat, oui, ça cela aurait du sens.
Est-ce au gouvernement qui veut obliger inciter les internes à finir leurs études seuls en territoire désertique ? Une 4ème année de troisième cycle est en effet prévue pour les internes de Médecine Générale afin de valider la qualification européenne. Il semble difficile de s’y soustraire, même si nos pauvres internes ne sont pas enthousiastes à ajouter encore une année à leur déjà très long cursus. Mais s’ils doivent en plus exercer loin de leur famille, mal encadrés par des maîtres de stage pas forcément sur place, avec la sensation d’être là plutôt pour pallier une carence en médecins que pour affiner leur apprentissage, la pilule risque d’avoir du mal à passer. Et que dire de la population concernée, qui verra un nouveau médecin encore peu expérimenté changer tous les 6 mois ? Mépris pour les étudiants en médecine, mépris pour les patients.
Mais non, je crois que la palme revient au député Damien Maudet, qui voudrait interdire l’installation de nouveaux médecins dans sa circonscription. Comme beaucoup d’autres avant lui, il propose que dans les zones correctement dotées en médecins, l’arrivée d’un nouveau praticien soit conditionnée au départ d’un autre. Cette proposition n’a rien de nouveau en soi, mais l’originalité réside dans le fait que lui-même se trouve dans le 4ème département le plus riche en médecins (Haute Vienne), que ce soit en termes de généralistes comme pour de nombreuses autres spécialités. Alors soit il pousse le sens collectif jusqu’à risquer son poste (car ses électeurs potentiels risquent de ne pas apprécier), soit il n’a pas saisi qu’il était plutôt bien loti et que les zones rurales n’étaient pas forcément les plus pauvres en médecins. Ah préjugé, quand tu nous tiens !
Je vous souhaite une bonne semaine.