Le Règlement Arbitral (RA) est paru au Journal Officiel le 28/04/2023.
Sans surprise, il reprend la Convention, sauf quelques détails qui pour certains ne sont pas du tout des détails.
Il est applicable dès aujourd’hui … sauf les revalorisations tarifaires qui n’interviennent pas avant le 01/11/2023, sauf exceptions que je vais détailler.
Une première remarque de pure forme : nous n’intéressons tellement pas notre Ministre de la Santé François Braun qu’il n’a même pas signé l’arrêté, et laissé cette tâche à des administratifs … c’est à la mesure de la considération que le gouvernement a pour nous.
Et alors que nous n’attendions rien, que nous savions déjà que nous allions être déçus, ce RA arrive encore à nous surprendre … en mal. Même si en cherchant bien on peut y trouver une ou deux miettes intéressantes.
Ou alors il est écrit de façon tellement confuse qu’on n’y comprend rien …
Les rémunérations :
Pour l’immédiat, la rémunération horaire (cotisations sociales prises en charge) pour la régulation libérale passe à 100 € (120 € dans les DROM) mais … uniquement pour la régulation du SAS. Pas pour la régulation de la PDSA.
Et la consultation initiale d’inscription d’un médecin en tant que médecin traitant pour un patient relevant d’une ALD exonérante, cotée IMT 60€ (72€ dans les DROM) sera applicable … dès la mise à jour de la NGAP. Et de nos logiciels de facturation. Normalement vers le 15 mai puisque la CHAP se réunit le 11 pour en discuter.
Un point très obscur : le RA supprime l’article 18.2 de la convention qui met en place MUT et MCU … mais réécrit l’article 28.2.4 qui régit leur application ! Alors MUT et MCU, cotable pour l’adressage par le Médecin traitant ou seulement par le régulateur du SAS ?
Le FPMT est bien réévalué en partie, mais seulement à partir du FPMT 2024 dont le solde sera versé en 2025 !
Comme prévu, les consultations et visites, pour les médecins secteur I ou Secteur II OPTAM ou Secteur II facturant au tarif opposable, seront majorées de 1,5 € (1,8 € dans les DROM) par le biais de l’augmentation de la MMG ou de la MPC :
Par dérogation aux tarifs fixés par la convention, les actes suivants sont revalorisés de 1,5€ :
- la consultation/visite de référence des médecins généralistes (G, GS, VG, VGS) via la revalorisation de la MMG ;
- l’avis ponctuel de consultant, facturé APC (ou APV), APY (ou AVY) dans les conditions définies à l’article 18 des dispositions générales de la NGAP ;
- les consultations complexes ou spécifiques suivantes : CCX, CDE, CCP, COE dans les conditions définies en NGAP ;
- la majoration (MPC) de la CS et la majoration (MPC) de la CNPSY pour les neurologues, neuropsychiatres et psychiatres dans les conditions fixées par l’article 2 bis des dispositions
- générales de la NGAP ;
- la majoration de coordination cardiologues MCC ;
- la majoration spécifique NFP des pédiatres pour la prise en charge des enfants de 0 à 2 ans ;
- la majoration spécifique NFE des pédiatres, dans les conditions prévues par la NGAP.
La revalorisation est de 1,80€ pour les DROM
Le RA crée une nouvelle cotation VSP (Visite de Soins Palliatifs) qui remplace la VL pour les patients en Soins Palliatifs, au même tarif, à partir du 01/11/23, et qui ne sera pas limitée en nombre. Donc on peut s’attendre à des contrôles ; en attendant, la VL soins palliatifs reste limitée à 4 par an.
On constate immédiatement que les téléconsultations et téléexpertises ne sont pas concernées. Pas plus que les consultations très complexes ou les majorations de consultations complexes. Mais on s’y attendait.
Beaucoup plus surprenante est l’absence totale de mention des consultations obligatoires des enfants, que ce soit pour les généralistes (COD et COB) ou les pédiatres (COH et COG). Allons-nous nous retrouver à facturer MOINS cher et en tiers-payant les consultations obligatoires que les consultations « normales » ? Dans ce cas je prévois une baisse drastique de l’utilisation de COD et COB et tant pis pour l’accès aux soins. Je préfère croire en une rédaction maladroite ou incomplète, comme pour MUT-MCU ci-dessus.
Heureusement il y a 6 mois pour corriger le tir et publier un RA rectificatif !
Sans surprise aussi le SNP cher à François Braun est pérennisé.
Ah ! et aussi la MPA est remplacée par la MOP. Même montant, mêmes modalités, mais plus le même nom. Pourquoi ? Mystère. Sauf qu’il faudra désormais penser à la coter ! donc simplification pour les caisses, qui compte peut-être aussi sur la capacité d’oubli des médecins pour faire des économies dessus.
Et donc on voulait plus de simplicité … et on écope de 3 nouvelles cotations, MOP, IMT et VSP ! Logique Shadok
Le Forfait Structure.
Presque le seul point un peu positif. L’exercice coordonné et ses 120 points repassent dans le volet 2, et quittent donc le volet 1. C’en est donc fini de la quasi-obligation d’adhésion aux CPTS pour le toucher. Quelqu’un a fini par se rendre compte de la grogne des médecins à ce sujet … ou plus prosaïquement a réalisé que le déploiement des CPTS se déroule beaucoup plus lentement que prévu initialement. Mais c’est aussi la fin d’une incitation forte pour les médecins à adhérer aux CPTS. Auront-elles encore le succès escompté ?
L’item spécial « Alimentation du DMP avec les VSM des patients en ALD » voit logiquement son terme passer du 30/06/23 au 31/12/23, du fait du retard du déploiement des logiciels Ségur. Mais ça ne répond pas à la problématique : comment remplir 90% des dossiers quand 12 à 15 % des patients n’ont PAS de DMP ?
Sinon je vous laisse adorer l’usine à gaz persistante pour le volet 2, qui est de plus en plus un « forfait pour l’utilisation des téléservices », dont certains ne sont même pas opérationnels, comme la e-prescription et la e-CV !
Parce qu’en fait la CNAM n’a toujours pas compris que pour convaincre les médecins d’utiliser les téléservices, il faut que ceux-ci soient efficients, et que je préfère 1000 fois ne pas toucher les 70 € de prime d’utilisation des prescriptions de transport sur EspacePro que de perdre 10 mn à essayer de comprendre comment ça marche.
Feuilles de soins dégradées :
On nous a enfin entendus, nous allons pouvoir enfin nous dispenser de l’envoi des duplicatas papier ! chouette !
Ah mais oui mais non. En réalité ce sera remplacé (quand ce sera mis en place, donc pas demain) par une procédure tellement alambiquée d’envoi de duplicatas scannés DE BONNE QUALITÉ sur une plateforme sécurisée que finalement … je vais en rester aux duplicatas papier. Ou même probablement ne plus faire de FSD.
C’est le progrès vu du côté CNAM.
Les assistants.
Comme c’est le sujet chouchou du président, on a essayé de le soigner. Mais essayé seulement …
Toutes les spécialités médicales sont éligibles à l’aide conventionnelle, à l’exception des radiologues, radiothérapeutes, stomatologues, anesthésistes, médecins anatomocytopathologistes et médecins nucléaires. Les chirurgiens sont éligibles au dispositif dès lors que leurs honoraires CCAM représentent moins de 20% de leurs honoraires totaux. Je ne sais toujours pas ce que fait un chirurgien qui ne facture pas en CCAM, mais probablement pas de la chirurgie.
La seule obligation maintenant pour embaucher, c’est d’avoir une patientèle (enfants et adultes) supérieure au 30e percentile pour les généralistes, ou une file active supérieure au 30e percentile pour les spécialistes.
Mais les contrat à 1/3 ETP disparaissent. Seuls persistent les ½ ETP et les ETP. Et même plus qu’un ETP si la situation l’exige !
Le principe de non-substitution persiste mais on peut pour remplacer la secrétaire promue assistante avoir recours à un secrétariat médical téléphonique (sur justificatif à produire lors de la signature du contrat) pour un durée équivalente a minima au temps de travail du poste à remplacer.
C’est toujours l’usine à gaz complètement tordue pour la fixation des objectifs d’augmentation de file active ou de patientèle : je vous laisse admirer :
Pour 1 ETP : ((0-((P30×coefficient)-((P50-P30)×((P30×coefficient)/(P99-P30)))))/(P99- P50))×(patientèle-P50)+((P30×coefficient)-((P50-P30)×((P30×coef)/(P99-P30))))
Pour 1/2 ETP : ((0-((P30×coefficient)-((P50-P30)×((P30×coefficient)/(P95-P30)))))/(P95- P50))×(patientèle-P50)+((P30×coefficient)-((P50-P30)×((P30×coef)/(P95-P30))))
Celui qui comprend est prié de ne PAS essayer de m’expliquer.
Cependant vous pouvez utiliser l’outil de calcul de la CNAM pour voir à quelle sauce vous serez mangé.
Mais le vrai problème est plus loin :
Les contrats d’aide à l’emploi d’un assistant médical signés lors de la précédente convention médicale en cours à la date d’entrée en vigueur du présent règlement s’appliquent jusqu’à leur terme mais ne peuvent pas être renouvelés à l’exception des contrats pour l’emploi d’un tiers temps d’assistant médical qui pourront être renouvelés.
Donc à l’issue des contrats existants, ou à leur date anniversaire, il faut mettre fin au contrat et en conclure un nouveau. Et c’est là que le bât blesse, parce qu’on peut lire aussi :
Pour la fixation des objectifs, la patientèle de départ prise en compte est celle arrêtée au 31 décembre de l’année précédant la signature du contrat ou au 30 juin de l’année en cours, selon la date de signature du contrat avec la caisse.
Donc si on prend à la lettre ce qui est écrit, les médecins qui ont déjà un assistant, et ont déjà fait l’effort d’augmenter leur patientèle et leur file active, repartent à zéro avec de nouveaux objectifs, forcément plus élevés. Le seul point positif étant que l’aide repart aussi à zéro, et qu’elle est versée les deux premières années sans regarder la progression vers les objectifs.
Comme pour la non revalorisation des COD, COB, COH et COG, je préfère croire qu’il s’agit là d’une imprécision de rédaction. Mais alors qu’on a 6 mois pour corriger le tir pour les honoraires, les nouvelles modalités pour les assistants sont déjà valides. Il est donc urgent que le ministère précise son texte (le RA reprend sur ce point ce qui était dans le projet de convention rejeté par les syndicats, c’est donc le texte de la CNAM et pas celui de Mme Morel) et le corrige rapidement si nécessaire.
Parce que les médecins qui ont déjà un assistant risquent de trouver la blague peu amusante et peut-être bien de renoncer à l’aventure, si les règles changent en cours de route.