Je place en PJ, à l’appui de mon propos, la copie anonymisée d’un ordre de mission de la CPAM de l’Yonne.
Selon mon interprétation juridique que j’ai confrontée à l’avis de juristes professionnels, c’est évident l’identité d’un patient rattachée à celle d’un professionnel du soin sont des données de santé couvertes par le secret médical. Et pour mieux l’expliquer je répète à qui veut bien m’entendre : « dis-moi qui te soigne et je te dirai ce que tu as ! » Cet exemple caricatural est limpide tant certains spécialistes sont « marqués » par leur spécialité d’exercice, et il illustre parfaitement cette problématique.
Un telle saisie d’agenda, pour être légale, ne saurait se dérouler que sous des scellés1 fermés, dans le cadre d’une commission rogatoire ordonnée par un juge d’instruction, déléguée à un OPJ 2 et en présence d’un médecin représentant le CDOM.
Le fait qu’il s’agisse d’une enquête diligeantée par l’Assurance Maladie, y compris pour une supposée fraude n’exonère en rien celle-ci du respect de la loi !
Le fait que le directeur de la caisse missionne un autre médecin (médecin conseil) ou des agents sapiteurs « assermentés » n’exonère en rien ces agents et le directeur (qui les a missionnés) du respect de la Loi.
La loi (2002-303) a d’ailleurs prévu de réprimer ces agissements d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende !
Aussi j’invite les directeurs de CPAM, mais aussi l’ensemble des médecins à relire la loi :
- L’Article 4 du Code de Déontologie médicale (article R.4127-4 du code de la santé publique) mais aussi ses commentaires sur le site du CDOM à :
Article 4 : « Le secret professionnel, institué dans l’intérêt des patients, s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi.
Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris. »
- La LOI n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
lien de téléchargement ici
Je vous invite à bien examiner l’article L.1110-4 qui précise : « ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, … » c’est-à-dire que le secret s’impose pour tout ce que le médecin a pu voir, entendre ou même deviner ou déduire. Même les constatations « négatives » doivent être tues. Il n’y a donc pas de différence entre le « renseignement administratif » (nom, adresse…) et « médical » (diagnostic, traitement…), entre la confidence et le renseignement « anodin ».
On attend du médecin une discrétion totale (même sur ce qu’il peut avoir appris en dehors des soins qu’il donne).
Dr Marcel GARRIGOU-GRANDCHAMP, Lyon 3è CELLULE JURIDIQUE FMF
1 scellés : du latin sigillare : sceau
2 OPJ : Officier de Police Judiciaire