EXERCER EN DEHORS DE LA CONVENTION

Un choix en passe de devenir une obligation pour le médecin libéral français


Dans ce contexte les médecins exerçant en secteur 1 déjà installés n’ont comme solution pour survivre que l’accroissement substantiel de leur activité avec ses limites, la pratique des dépassements non autorisés et la certitude d’être tôt ou tard sanctionné par les caisses de sécurité sociale ou le déconventionnement.


Pour les praticiens conventionnés en exercice, la convention 2011 prévoit au niveau de son article 69 (Modalités de rupture d’adhésion) que conformément à l’article R. 162-54-9 du code de la Sécurité sociale, « …le médecin qui souhaite ne plus être régi par les dispositions de la convention en informe la caisse primaire de son lieu d’installation par lettre recommandée avec avis de réception. Sa décision prend effet un mois après la date de réception de son courrier par la caisse » et se prolonge sur toute la durée de la convention en cours.


Attention, les médecins bénéficiant du secteur 2, ne peuvent être certains de retrouver ce secteur en cas de changement d’avis pour la prochaine convention et le fait de ne plus être « conventionné » ne les délivre pas totalement du respect de certains textes législatifs et notamment :

  • Le code général des impôts,
  • Le code de la santé publique et code de la sécurité sociale (notamment l’art L114-18) qui impose l’affiliation aux régimes obligatoires :« Toute personne qui, par quelque moyen que ce soit, incite les assujettis à refuser de se conformer aux prescriptions de la législation de Sécurité sociale, et notamment de s’affilier à un organisme de Sécurité sociale ou de payer les cotisations et contributions dues, est punie d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 15 000 euros ou de l’une de ces deux peines seulement ». En revanche la CNAM peut refuser de l’affilier au régime de sécurité sociale (chambre sociale de la cour de cassation 09/04/1998), mais le régime des travailleurs indépendants peut prendre en charge ce risque. 
  • Le code de Déontologie médicale, et comme ses confrères en secteur 2 il doit respecter le « tact et mesure » et tenir compte des recommandations de « bonne pratique » notamment celles de la Haute Autorité de Santé (HAS) et les données acquises de la science. Il doit bien entendu recevoir les patients titulaires de la CMUC sans discrimination à leur demande.

Si le médecin NC salarie un professionnel de santé celui-ci peut être conventionné et dispose de feuilles de soins (FSP) mises à sa disposition par la caisse. (cas par exemple d’un ophtalmologiste salariant un(e) orthoptiste, ou un chirurgien une infirmière…


Pour les patients, les honoraires du praticien hors convention ne sont pas pris en charge par l’assurance maladie et bénéficient d’un remboursement sur la base du tarif d’autorité qui est de 0,98 € mais peut être complété par une mutuelle. La prise en charge des actes techniques est limitée à 16% selon l’art 2bis de l’arrêté du 16 décembre 2006 (JORF n° 291 du 16 décembre 2006, page 19016, texte 42)

En revanche toutes ses prescriptions sont normalement remboursées par l’assurance maladie.
Toutefois, il parait délicat pour l’assurance maladie de bloquer le remboursement des actes lorsque tous les spécialistes d’un même bassin de population sortent de la convention.

En ce qui concerne les praticiens appartenant aux plateaux techniques lourds(collège n°2 des URPS), le règlement intérieur de certains établissements peut être une entrave à l’exercice hors convention des médecins. cette restriction est d’une part juridiquement contestable, et d’autre part ne résisterait pas à «l’effet de seuil» si une ajorité de praticiens d’un même établissement quittaient en même temps la convention.

Le médecin non conventionné (NC) dispose de feuilles de soins papier (FSP) délivrées par la CPAM mentionnant sa non appartenance au secteur conventionnel, FSP qu’il doit remettre à chaque acte aux patients en précisant les honoraires perçus, en revanche il n’est pas soumis à l’obligation conventionnelle de télétransmission et ne pourra pas être traduit devant une CPL par le directeur de la CPAM dont il dépend pour défaut ou insuffisance de télétransmission.


Le médecin non conventionné (NC) peut être le médecin traitant (MT) au sens conventionnel et orienter ses patients dans le cadre du parcours de soins et peut bien entendu rédiger des arrêts de travail.


Au niveau des cotisations sociales :

  • Il n’y a pas d’impact au niveau de l’assurance RCP,
  • Il est tenu de cotiser à la CARMF mais reste dispensé des cotisations « adossées » à la convention que sont l’ASV et l’ADR (économie de 1 260 € par rapport au S1 et 3 780 par rapport au S2 à laquelle il faut rajouter 0,035% du BNC pour l’ADR) ; en sachant que la cotisation ASV va « flamber » dans les années à venir pour les S2.
  • Un médecin exerçant hors convention revient donc moins cher à l’assurance maladie cette dernière économisant 2 520 € par rapport à un médecin en secteur 1.

  • il doit également cotiser à l’URSSAF sans aucun abattement ou prise en charge (à la manière des S2) les cotisations d’allocations familiales, les contributions CSG et CRDS et la contribution à la formation professionnelle. Les cotisations sont calculées sur les revenus professionnels. Les taux applicables sont de 5,40 % pour les allocations familiales, 7,50 % pour la CSG et 0,50 % pour la CRDS. La contribution à la formation professionnelle correspond à 0,25% du plafond annuel de la Sécurité Sociale soit 94 euros pour 2015 (qui prend pour base le plafond de 2014 soit 37 548 €) exigible en février 2012. En revanche il est dispensé de cotisation aux URPS (190 € en 2015) en vertu de l’article L4031-2 du code de santé publique qui stipule que la cotisation est due « …par les professionnels de santé en activité exerçant à titre libéral dans le régime conventionnel... »

Globalement il s’agit bien d’un choix gagnant-gagnant autant pour les caisses (qui économisent leur participation aux cotisations) que pour le médecin qui voit ses contraintes administratives allégées et retrouve des possibilités de financements des investissements nécessaires à un exercice de qualité, mais également pour le patient qui conserve le libre choix d’un médecin qui a la possibilité de lui consacrer plus de temps et d’attention.


Mais avec le vote de la loi de santé le 1er décembre 2015, ce choix est en passe de devenir une obligation
pour des raisons économiques et libertaires comme je le disais en introduction, sauf à voir disparaître le secteur libéral du territoire français ; les pouvoirs publics sourds aux revendications des médecins mais plus attentifs à celles des complémentaires et autres industriels ne peuvent l’ignorer. Et les principaux intéressés, les français risquent malheureusement de se « réveiller » trop tard !


Dr Marcel GARRIGOU-GRANDCHAP, Lyon , CELLULE JURIDIQUE FMF



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