Lettre aux Confrères
FMF FEDERATION DES MEDECINS DE FRANCE.
60 rue Laugier 75017 Paris.
Paris, le 12-10-2011.
Cher confrère,
Comme tous les médecins de France vous êtes exaspéré par l’usage de plus en plus intensif et de plus en plus abusif que font les Caisses de l’art. 133-4 du Code de la sécurité sociale, celui qui permet aux Caisses de récupérer sur les prescripteurs des « indus » parfois considérables à la moindre erreur, y compris celles induites par des réglementations inapplicables en situation.
Cette disposition législative existe certes depuis 1996, mais après une première aggravation en 2004 par le Parlement, elle a atteint un comble d’iniquité en 2007 quand les députés et sénateurs ont légalisé par une nouvelle modification une pratique des Caisses que la Cour de cassation avait condamnée, à savoir que les médecins subiraient l’indu même quand le bénéficiaire en avait été le patient, le pharmacien ou tout autre prestataire.
Si la FMF vous écrit à ce sujet aujourd’hui, c’est pour vous faire connaître le courrier ci-joint qu’elle adresse aux 4 rapporteurs de ce projet de loi à l’Assemblée Nationale, dont le député de votre circonscription, M ceux-ci ayant joué un grand rôle dans l’adoption par leurs collègues de cette modification.
Notre courrier lui expose les conséquences délétères qu’a aujourd’hui son action législative d’alors, et l’invite à œuvrer maintenant à leur résorption autant que faire se peut. Nous comptons sur les médecins de sa circonscription pour appuyer au plus près notre action.
Je vous prie de croire, cher confrère, en l’assurance de mes meilleurs sentiments confraternels et syndicaux.
Jean-Paul Hamon,
Président de la FMF.
EXTRAIT DU RAPPORT SUR LA LOI 2007-1786 modifiant l’art. 133-4 du CSS
Des Députés Yves BUR, Jean-Pierre DOOR, Hervé FERON et Denis JACQUAT
A leurs collègues.
« c) La récupération des indus
L’article 107, portant modification de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, permet d’une part, de récupérer des indus auprès des professionnels et établissements de santé, d’autre part d’appliquer la prescription de droit commun lorsqu’une fraude est à l’origine de l’indu.
L’article L. 133-4 précité dispose qu’en cas d’inobservation des règles de tarification ou de facturation des actes, prestations et produits médicaux ou des frais de transport, l’organisme de prise en charge peut recouvrer l’indu auprès du professionnel de santé ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles.
Or une jurisprudence récente de la Cour de cassation, tout en visant cet article, a considéré que l’indu ne peut être récupéré qu’auprès de celui qui a effectivement perçu la somme en cause, c’est-à-dire l’assuré. Cet arrêt s’appuie sur les articles 1235 et 1376 du code civil. Cette jurisprudence posant problème aux caisses d’assurance maladie qui, jusqu’à maintenant, récupéraient les indus auprès des professionnels et établissements de santé, il a paru nécessaire de préciser explicitement à l’article L. 133-4 que l’indu peut être récupéré auprès des professionnels et établissements de santé, même si le remboursement a été effectué à l’assuré.
Selon les informations communiquées par le gouvernement, cet article est d’application directe mais le rapporteur estime nécessaire que lors de l’examen parlementaire du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, un bilan de sa mise en œuvre soit présenté par le gouvernement pour évaluer si les caisses d’assurance maladie ont bien été en mesure de recouvrer leurs créances ».
Lettre à mon député
FMF, Paris, le
Fédération des Médecins de France,
60 rue Laugier 75017 Paris.
Le Président,
Jean-Paul Hamon. M. Jean-Pierre DOOR,
Député.
Monsieur le Député,
Je vous prie de trouver ci-après la lettre que le Dr Marcel Garrigou-Grandchamp, responsable de notre Cellule Juridique, est amené à faire à des parlementaires, responsables politiques et directeurs de Caisses de Sécurité Sociale.
Notre syndicat a décidé de l’adresser pour information aux médecins libéraux de votre circonscription ainsi que la copie du présent courrier à votre intention, dans la mesure où ce qui est en question est l’art. L. 133-4 du Code de la Sécurité Sociale, celui qui permet aux Caisses de prélever sur les médecins des « indus » parfois considérables souvent sous le seul prétexte d’une réglementation inapplicable en situation de par sa propre complexité.
Plus précisément le comble de l’insupportable est atteint, comme l’explique le Dr Marrigou-Grandchamp, par l’aggravation significative de cet article due à la modification apportée par l’art. 107 de la loi 1786-2007 , modification instituant l’indu pour le praticien y compris lorsque le bénéficiaire de l’erreur n’est pas le prescripteur mais le patient, le pharmacien ou tout autre prestataire.
Or il se trouve, Monsieur le Député, que vous avez joué un grand rôle dans cette modification calamiteuse qui contribue avec d’autres règlementations du même type à la désertion de la médecine libérale, puisque vous avez été rapporteur de la loi 1786-2007 à l’Assemblée Nationale au titre de la Commission des Affaires culturelles, familiales et sociales.
Nous espérons donc sincèrement que prenant la mesure des dégâts collatéraux induits par cette législation inadaptée, vous aurez à cœur, au regard de votre rôle passé, d’œuvrer à un rapide amendement de ces dispositions délétères.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Député, l’expression de mes salutations très distinguées.
Dr Jean-Paul Hamon,
Président de la FMF.
Lettre aux directeurs des caisses de sécurité sociale, aux Parlementaires et autres responsables politiques
Ou comment accélérer la fuite des médecins hors du secteur libéral
samedi 8 octobre 2011
par GARRIGOU-GRANDCHAMP Marcel
[->http://www.fmfpro.org/marcel-garrigou-grandchamp.html][->http://www.fmfpro.org/marcel-garrigou-grandchamp.html]lHier encore appel d’un médecin victime d’une demande d’indu par un directeur de caisse d’assurance maladie, aussi je viens attirer l’attention de tous sur l’application abusive qui tend à se généraliser de l’Article L133-4 du Code de la Sécurité sociale :
« … En cas d’inobservation des règles de tarification ou de facturation :
1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7 ou relevant des dispositions des articles L. 162-22-1 et L. 162-22-6 ;
2° Des frais de transports mentionnés à l’article L. 321-1,
l’organisme de prise en charge recouvre l’indu correspondant auprès du professionnel ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement… »
Ce texte voté par les Parlementaires permet en effet de réclamer à des professionnels de santé ou à des établissements des sommes qu’ils n’ont pas perçues en plaçant sur un même plan le non respect de règles en ce qui concerne les honoraires (perçus par le professionnels de santé qui en est à l’origine) et les prescriptions (qui ont généré des revenus perçus par d’autres que lui) et c’est en ce sens que j’estime que ce texte est à l’origine d’un abus de droit.
Je vais appuyer mon argumentaire sur quelques exemples concrets tirés de notre expérience au sein de la CELLULE JURIDIQUE de la FMF :
1) Le médecin prescrit un médicament en dehors de l’AMM, il en a parfaitement le droit, seul compte le rapport bénéfice/risque pour le patient et les acquis de la science, le patient peut même engager la responsabilité d’un médecin pour « perte de chance » si ce dernier s’était abstenu de prescrire un médicament ayant par la suite prouvé son efficacité. Mais le médecin oublie de préciser « NR » sur son ordonnance.
Le médecin prescrit un médicament dans le cadre de l’AMM mais pour une indication ne donnant pas lieu à remboursement (exemple OMACOR® pour une hypertriglycéridémie, pris en charge par la sécurité sociale qu’en post infarctus) ; mais le médecin oublie de préciser « NR » sur son ordonnance.
Dans les 2 cas le directeur de la CPAM demande le remboursement de la prescription au médecin alors qu’il n’a bénéficié en rien de cette prescription qui a profité au laboratoire pharmaceutique, au pharmacien et au patient.
2) Le médecin prescrit un traitement pour les apnées du sommeil avec un appareillage facturé au moyen d’un forfait que la sécurité sociale conteste à postériori, le directeur de la CPAM demande le remboursement au médecin de plusieurs dizaines de milliers d’euros qui ont été perçus non par lui mais par le fournisseur de matériel !
L’Article L133-4 du Code de la Sécurité Sociale entre en contradiction avec le Code Civil qui précise au niveau de son Article 1376 :
« Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s’oblige à le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu ».
Il parait donc souhaitable que le législateur apporte une clarification à ce point de droit, mais en attendant certains directeurs de caisses notamment du RSI appliquent avec zèle cette disposition particulièrement injuste et démoralisante pour des spécialistes en médecine générale par ailleurs bien malmenés.
Leur solution est vite trouvée : la fuite hors du secteur libéral devenu un véritable repoussoir pour les jeunes, en direction du salariat ou de la retraite anticipée aggravant des déserts médicaux qui touchent non seulement nos campagnes mais également la périphérie des grandes villes ; et quand j’entends des responsables politiques prôner la coercition à l’installation je ne peux que déplorer leur incompétence.
Dr Marcel Garrigou-Grandchamp,
Responsable de la cellule juridique de la FMF.