Chers Amis,
La grande affaire de la semaine a été l’annonce (par le Président Macron, pas seulement la Ministre de la Santé) du plan santé pour les 5 ans à venir « Ma santé 2022« . Trois grands axes sont développés.
Le 1er axe est l’accès aux soins pour tous, et pour une fois, M. Macron parle de l’accès territorial, pas de l’accès financier. Dommage qu’il ait fallu attendre d’avoir 2/3 de la France en désert médical pour initier de timides mesures. La principale est l’apparition d’assistants médicaux pour libérer du temps aux médecins. Mesure intéressante, qui fait l’unanimité dans tous les syndicats. Seule contrepartie pour le médecin : accepter de nouveaux patients. Ce qui semble une évidence : si on a plus de temps, on prendra plus de patients. Le bémol, c’est que ces assistants seront réservés aux cabinets de groupes dans les zones sous-dotées. Et qu’il n’en est prévu que 4 000 pour les 100 000 médecins libéraux, soit 1 assistant pour 25 médecins. Pas sûr que cela résorbe la pénurie de médecins. Et un détail reste en suspens : qui paiera et combien ?
Il est également prévu de faire embaucher 4 000 généralistes par les hôpitaux, mais on n’en sait pas plus. Vont-ils travailler en ville, à l’hôpital ? Faire de la médecine générale ou seulement des urgences ? S’agit-il des postes décrits dans l’instruction de la DGOS du 27 juin 2018 ?
Le plan parle aussi de libérer du temps médical en développant la E-prescription et la télémédecine. J’avoue, je ne vois pas bien le rapport. Utiliser des outils informatiques n’a jamais fait gagner du temps aux médecins (certains diraient même que …), à moins d’uniformiser les pratiques jusqu’à tout faire en protocoles pré-établis. Mais alors, pourquoi avoir des médecins ?
Enfin, dans cette rubrique d’accès aux soins se trouve la disparition du numerus clausus. Sans autres détails sur les nouvelles procédures de sélection.
Le 2ème axe est la création de CPTS (Communautés Professionnelles Territoriales de Soins) tous azimuths. L’objectif est que « l’exercice isolé disparaisse en 2022 ». Bon, nous voilà avertis. Ces CPTS s’adresseront à des populations de 20 000 à 100 000 habitants, et auront 6 missions :
- faire des actes de prévention
- assurer un médecin traitant pour tous
- assurer les soins non programmés de 8H à 20H (si possible ensuite 22H !)
- aider les patients à accéder aux soins spécialisés
- participer à une meilleure coordination ville/hôpital
- aider au maintien à domicile. Elles devront utiliser une messagerie sécurisée, remplir les DMP, mettre en place un agenda partagé, faire des E-prescriptions, and last but not least, systématiser la prise de RDV en ligne ! Moyennant quoi, des rémunérations spécifiques sont prévues, mais à négocier avec l’Assurance Maladie. Euh, pour convaincre des médecins libéraux de se mettre ainsi sous tutelle, il y aura intérêt à mettre le paquet sur la table !
Le 3ème axe concerne l’hôpital, qui devra se recentrer sur les actes complexes spécialisés. Il est prévu entre autres un forfait de réorientation vers la ville de patients venus aux urgences, ce qui est plutôt une bonne chose. Et un financement de pathologies chroniques au forfait. Seront expérimentés dans un premier temps les suivis du diabète et de l’insuffisance rénale. Avec une curieuse phrase, qui traduit bien l’ignorance totale de notre métier par ceux qui nous gouvernent : « A charge pour les équipes de faire en sorte que le patient n’ait pas à revenir à l’hôpital ». La prochaine étape sera sans doute de faire en sorte que le patient ne meure jamais. La liste des 54 mesures se trouve ici, et le plan sur le site gouvernemental.
L’autre nouvelle d’importance a été la possibilité de coter les actes de télémédecine depuis le 15 septembre. Je ne reviendrai pas sur la description de la télémédecine que j’ai bien détaillée dans un précédent Point Hebdo (Voir aussi sur le site de la FMF). Mais sur l’utilisation de ce remboursement, qui fait surtout les beaux jours des plates-formes commerciales, beaucoup plus que des médecins (dont certains logiciels ne permettent même pas la cotation TCG). Deux exemples : LIVI (plate-forme suédoise) veut créer une « CPTS digitale » pour prétendre au remboursement, mais avec des médecins disséminés partout dans le monde (la notion de « Territoire » est vaste !) ; Med-e-Share demande au préalable l’accord des patients pour « monétiser » leurs données à visée d’études et de statistiques. Quant à Deuxième Avis, elle proclame vouloir réduire les inégalités d’accès aux experts médicaux, mais elle ne revendique pas le remboursement des 250 euros de la consultation, car cela « allongerait les délais de RDV ». Et après ça, M. Macron veut nous obliger à utiliser les plates-formes de RDV en ligne, dirigées par les mêmes types de personnes.
Comme j’ai été bien longue, je finirai par une seule info pratique : notre ami Eric Lion nous informe qu’il existe une appli « Certdc » pour établir les certificats de décès en ligne. Il nous en explique la procédure.
Je vous souhaite une bonne semaine.